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Face à l'oubli : le patrimoine disparu en Charolais-Brionnais
Les châteaux de Chamron et Montceaux-l'Etoile Les châteaux de Chamron et Montceaux-l'Etoile Les châteaux de Chamron et Montceaux-l'Etoile

Les châteaux de Chamron et Montceaux-l'Etoile


En 1789, le marquis de Vichy, Abel-Marie-Claude-Marthe (1740-1793), est l'un des plus grands propriétaires terriens du Brionnais : une trentaine de domaines ruraux et 4 châteaux, dont ceux de Chamron et Montceaux. Mais une Révolution peut tout changer...

Selon le chevalier de Courcelles (Histoire généalogique et héraldique des pairs de France, 1824), la maison de Vichy "d'ancienne chevalerie du Bourbonnais, tenait rang parmi les barons de cette province dès le milieu du XIe siècle. Elle a pris son nom de la ville et châtellenie de Vichy [...] devenue célèbre pour ses eaux minérales". Au XIVe siècle, Robert de Vichy s'installe dans le Brionnais suite à son mariage avec Marguerite de Chamron, dame dudit lieu (dans la paroisse de Ligny). Ils fondent la lignée des Vichy-Chamron. En 1373, il déclare tenir en fief la maison-forte de Chamron. Ses descendants s'illustrent dans la carrière des armes. Sous Louis XIII, Gaspard de Vichy-Chamron, Ier du nom, est nommé gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roy et lieutenant de la citadelle de Pont-Saint-Esprit en 1628. Puis, il obtient l'érection de la seigneurie de Chamron en comté en 1632 et est fait maréchal de camp en 1652. A la génération suivante, l'aîné de la famille porte le titre de marquis. Les brillantes alliances matrimoniales qu'ils forment leur permettent d'étendre leurs possessions dans le Beaunois, l'Auxois, le Châtillonais et le Beaujolais.


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  • Vue du château sur le plan terrier de 1784 (musée de la Tour du Moulin), avec la tour carrée et son toit à 4 pans (l'ancien donjon), les deux ailes mansardées de chaque côté et les pavillons derrière, dont les toits dépassent légèrement - © PCB Vue du château sur le plan terrier de 1784 (musée de la Tour du Moulin), avec la tour carrée et son toit à 4 pans (l'ancien donjon), les deux ailes mansardées de chaque côté et les pavillons derrière, dont les toits dépassent légèrement - © PCB
  • Vue du château avec les jardins et les dépendances sur le plan-terrier de 1784 (musée de la Tour du Moulin) - © PCB Vue du château avec les jardins et les dépendances sur le plan-terrier de 1784 (musée de la Tour du Moulin) - © PCB
  • Plan cadastral de saint-Julien-de-Jonzy en 1860, où n'apparaissent plus que le grand commun et le pigeonnier - © Archives départementales 71 Plan cadastral de saint-Julien-de-Jonzy en 1860, où n'apparaissent plus que le grand commun et le pigeonnier - © Archives départementales 71
  • Le grand commun aujourd'hui - © Hervé Mouillebouche/CECAB Le grand commun aujourd'hui - © Hervé Mouillebouche/CECAB
  • Le mur de soutènement de la terrasse du château - © Hervé Mouillebouche/CECAB Le mur de soutènement de la terrasse du château - © Hervé Mouillebouche/CECAB
  • Vue du château sur le plan terrier de 1784 (musée de la Tour du Moulin), avec la tour carrée et son toit à 4 pans (l'ancien donjon), les deux ailes mansardées de chaque côté et les pavillons derrière, dont les toits dépassent légèrement - © PCB
  • Vue du château avec les jardins et les dépendances sur le plan-terrier de 1784 (musée de la Tour du Moulin) - © PCB
  • Plan cadastral de saint-Julien-de-Jonzy en 1860, où n'apparaissent plus que le grand commun et le pigeonnier - © Archives départementales 71
  • Le grand commun aujourd'hui - © Hervé Mouillebouche/CECAB
  • Le mur de soutènement de la terrasse du château - © Hervé Mouillebouche/CECAB

Le château de Chamron

Le château de Chamron était construit sur une terrasse de 60 x 80 m, dominant le ruisseau du Bézo. Une description de 1730 précise que la bâtisse se compose d'"une grosse tour carrée, flanquée par deux gros pavillons et mansardes". Elle est accessible par un pont-levis, franchissant un fossé. Une représentation de l'édifice sur un plan-terrier de 1784 confirme cette description. Un jardin à la française avec des parterres et des allées de charmilles et une basse-cour avec plusieurs dépendances complétaient l'ensemble. Aujourd'hui, seuls subsistent le mur de soutènement de la terrasse du château et le grand commun, devenu bâtiment d'exploitation agricole. Une pierre datée de 1738 est visible à l'intérieur. Le musée de la Tour du Moulin à Marcigny conserve également quelques pierres sculptées provenant du château.

Après avoir été confisquée, la demeure est vendue comme bien national le 2 septembre 1794 pour un montant de 106 000 livres à un habitant de Marcigny, puis démolie. Toutefois, le marquis Abel la délaissait depuis plusieurs années déjà au profit du château de Montceaux, acheté par son père en 1755. Il s'y installe en 1769, préférant "à la sombre tour carrée de Chamron [...] la riante demeure qu'il s'organise à Montceaux-l'Etoile".


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  • Plan du domaine, avant les travaux du marquis de Vichy (restitution par Joseph Sandre, déb. XXe s.). On remarque les deux tours circulaires sur le château - © Académie de Mâcon Plan du domaine, avant les travaux du marquis de Vichy (restitution par Joseph Sandre, déb. XXe s.). On remarque les deux tours circulaires sur le château - © Académie de Mâcon
  • Plan du domaine sur le cadastre napoléonien (1839) - © Archives départementales 71 Plan du domaine sur le cadastre napoléonien (1839) - © Archives départementales 71
  • Vue du château de Montceau (restitution par Joseph Sandre, déb. XXe s.). Les deux bâtiments avec toits mansardés constituent probablement le corps de logis - © Académie de Mâcon Vue du château de Montceau (restitution par Joseph Sandre, déb. XXe s.). Les deux bâtiments avec toits mansardés constituent probablement le corps de logis - © Académie de Mâcon
  • La tour d'alchimie et d'astrologie, seul élément encore conservé, avec l'orangerie (aujourd'hui au milieu d'un pré) - © PCB La tour d'alchimie et d'astrologie, seul élément encore conservé, avec l'orangerie (aujourd'hui au milieu d'un pré) - © PCB
  • Lorsque Courtepée rencontre Abel, celui-ci est depuis peu un veuf inconsolable. Il fait édifier en 1775, dans l'église du village, une chapelle funéraire pour son épouse bien-aimée, Claude de Saint-Georges, victime à 32 ans de la tuberculose - © PCB Lorsque Courtepée rencontre Abel, celui-ci est depuis peu un veuf inconsolable. Il fait édifier en 1775, dans l'église du village, une chapelle funéraire pour son épouse bien-aimée, Claude de Saint-Georges, victime à 32 ans de la tuberculose - © PCB
  • Plan du domaine, avant les travaux du marquis de Vichy (restitution par Joseph Sandre, déb. XXe s.). On remarque les deux tours circulaires sur le château - © Académie de Mâcon
  • Plan du domaine sur le cadastre napoléonien (1839) - © Archives départementales 71
  • Vue du château de Montceau (restitution par Joseph Sandre, déb. XXe s.). Les deux bâtiments avec toits mansardés constituent probablement le corps de logis - © Académie de Mâcon
  • La tour d'alchimie et d'astrologie, seul élément encore conservé, avec l'orangerie (aujourd'hui au milieu d'un pré) - © PCB
  • Lorsque Courtepée rencontre Abel, celui-ci est depuis peu un veuf inconsolable. Il fait édifier en 1775, dans l'église du village, une chapelle funéraire pour son épouse bien-aimée, Claude de Saint-Georges, victime à 32 ans de la tuberculose - © PCB

Le château de Montceau

Avant d'appartenir aux de Vichy à partir de 1755, le château de Montceau est passée dans les mains de nombreuses familles. Le château date vraisemblablement de la fin du Moyen-âge. Une description de 1763 indique qu'il est "flanqué de deux tours". Le marquis Abel fait reconstruire l'ensemble des bâtiments, dont :

  • une grande orangerie et une serre chaude, où il cultive des arbres et des plantes exotiques,
  • un corps de logis avec une "riche bibliothèque", où Courtepée dit avoir vu le livre d'heures du duc de Bourgogne Jean Sans Peur,
  • et une tour abritant un laboratoire de chimie et un observatoire, où le marquis espérait accueillir son protégé, le célèbre alchimiste Cagliostro !

Lors de sa visite en 1776, Courtepée trouve que le résultat présente "plus d'aisance que de régularité". Il ne tarit pas d'éloges en revanche sur le châtelain, alors âgé de 36 ans : "Ma plume ne peut exprimer tous les sentimens de mon coeur envers ce digne seigneur", écrit-il alors qu'il n'a côtoyé le jeune homme que pendant deux jours. Le marquis de Foudras, autre témoin qui a connu le fils d'Abel, évoque une "superbe ménagerie [...] d'animaux vivants" et considère le château de Montceau comme "quasi-royal" (La vénerie contemporaine, 1860).

Ayant participé à l'insurrection de la ville de Lyon face au gouvernement révolutionnaire de la Convention, le marquis est fusillé en 1793 et ses biens sont confisqués. Son fils, également prénommé Abel, parvient à récupérer Montceau en 1795. Après avoir passé plusieurs années à Lyon, loin de son milieu d'origine, il éprouve de grandes difficultés à renouer avec les coutumes du grand monde et finit par revendre sa propriété en 1817 pour s'installer plus simplement à Marcigny. Le domaine est démantelé par les propriétaires suivants dans la seconde moitié du XIXe siècle.


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Quelques précisions...

Joseph Balsamo (1743, Palerme - 1795, San Leo), dit "le comte de Cagliostro" : Né dans un milieu modeste, il entre à 13 ans au séminaire du couvent des Fatebenefratelli de Caltagirone. Chassé de la communauté en 1758, il quitte la Sicile et traverse l'Europe et les pays méditerranéens sous divers noms d'emprunt. Il s'installe en France en 1780, où il se présente sous le nom de "comte de Cagliostro", comme une sorte de mage ayant acquis de ses voyages des dons de guérisons et des connaissances ésotériques (notamment en alchimie et en astrologie). Il fait fortune auprès de la haute-société qu'il escroque, avant d'être mêlé à l'Affaire du collier de la reine. Forcé à l'exil, il échoue en Italie, où il est arrêté pour hérésie. Il meurt d'apoplexie dans sa prison.